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Suffren |
Suffren - suite |
Eloge du lentisque |
Eloge du roseau |
![]() Les oursins de Suffren
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J'avais dans mes affaires lorsque j'étais "petite" un livret, intitulé "Devinettes, Calembours et Proverbes" (je l'ai toujours sous la main), d'une très haute valeur intellectuelle..., probablement donné ou glissé sous mon coude, par mon père ou ma grand mère Hélène qui de ce fait, voulaient sûrement me donner matière à reflexion et à méditation et au raisonnement simple. De toutes ces lignes, je n'en retenais que peu, les lisais à haute voix et si j'avais compris l'astuce, riait aux éclats. Je vous en livre quelques unes. Ne riez point..."Quel est le septième roi des Lapins? - Et le dixième ? - Quel est le poisson qui n'a point d'arêtes?...etc". Je trouvais donc - en cela un peu aidée - Lapin VII et Lapin X, le poisson d'Avril et après avoir gloussé, commençais à méditer sur les astuces de la langue française et ses difficultés.Et le summum était la devinette suivante :"Quels sont les ours les mieux portants?". Et là, pas un seul moment d'hésitation : "les oursins". J'avais tellement usé de ce mot, entendu ce mot, chaque été que j'avais eu tout loisir de le disséquer et de savoir que "sins" et "sains" se prononçaient de la même façon, mais que "sain" était synonyme de "bien portant" et par conséquent les ours bien portants étaient des oursins (sic). Nous en venons alors à ce qui nous préoccupe ici, l'objet de ces lignes : l'oursin. [Pour les initiés: sur la photo, à droite l'île de Sandja et à gauche la pointe de Jean-Bart. Nous sommes sur la plage de Suffren, au lieu-dit "La patience".] ![]()
Les premiers souvenirs d'oursins, se situent dans le lointain, à Suffren, en famille et c'était une véritable expédition. Il fallait tout un attirail spécial, et surtout, comme cela se passait loin de la maison, sur la plage, des chapeaux des parasols, des chemises pour le dos, et un bon pique nique. Du vin, rosé de préférence, du pain - ah le bon pain de Monsieur Sintès à Aïn Taya - des fruits, plutôt des pastèques et des melons, des tomates, du fromage et la bonne soubressade de Monsieur Suréda, enfin un peu de tout qui permettrait de tenir le coup un bon moment. Outre les provisions de bouche, qui ne viendraient qu'après les oursins, il fallait porter, les gaffes, les "carreaux" et les ciseaux pour ouvrir les bestioles, le coupe-oursin n'ayant pas encore fait son apparition. J'allais oublier un accessoire absolument nécessaire, une paire d'espadrilles avec de bons lacets, pour marcher sur les rochers plats emplis d'oursins, ne pas glisser au risque de se voir moucheté de points noirs douloureux. et plus de gaffe devenue inutile puisqu'il suffisait de plonger avec une fourchette à la main pour les déloger. Pas un jour sans oursins, excepté les jours de vent d'Est qui rendait la mer trouble, furieuse et impraticable pour autre chose que "prendre des vagues" avec des bouées énormes ou des matelas penumatiques, anticipation du surf devenu si mode depuis lors, ou les jours de vent d'Ouest, avec sa baffagne et ses plaques de goudron - on râlait mais il n'y avait pas encore eu, ni le Torey Canyon, ni l'Erika ni tous les autres, alors on frottait ses pieds à l'huile. Nous les filles, avec de l'Ambre Solaire - Sentez vous le parfum de l'Ambre Solaire tandis que vous lisez ces lignes ??? - Mais les jours de "calmasse" !!! oufff! Branlebas de combat, et descente en masse sur la plage pour remplir les fameux paniers (voir image au-dessus), après avoir raflé les fourchettes dans les tiroirs, ce qui faisait hurler les maîtresses de maison qui ne trouvaient plus rien pour cuisiner. Passons. La technique de la dégustation était différente de celle de mon enfance car pour plus de confort, nous remontions les paniers, et à l'ombre des araucaria et des melia (l'arbre à "boudilles")
Le jour terrible où nous allions abandonner - pour combien de temps; nous ne le savions pas - ces lieux enchanteurs, ces moments bénis des Dieux et de Dieu tout seul, bénis par nous aussi, intérieurement nous nous sommes juré de retrouver quelque part ces fonds marins, ces algues, ces poissons, cette température, ce soleil, et nos oursins dont nous savions bien qu'ils existaient aussi en Espagne, en Italie, En Grèce, en Turquie et bien sûr sur nos côtes françaises de Perpignan à Menton, enfin, je veux simplement dire dans notre Méditerranée. Non pas que je veuille rayer de la carte océanique tous les "echinodermes" qui peuplent le fond des mers.. mais ceux-là ne sont pas NOS oursins. Alors, chaque été si possible, nous retrouvons nos lunettes sous-marines, nos fourchettes, et si autorisation il y a, nous les ramassons, le souffle bien plus court, mais heureux.
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Les superbes oursins de mon ami Marc de Bains Romains. |
ADDENDUMLors d'un vernissage à Agde, le 5 mars passé, consacré à l'uvre de Eugène Dufour, peintre provençal, étaient exposés également des toiles de ses amis. Une d'elle figurera ici en bonne place car elle vient illustrer aussi notre amour des oursins. |
![]() L'ouvreur d'oursins par Marcel Arnaud Peintre marseillais Avec l'aimable courtoisie du Commissariat d'Exposition et particulièrement Bérangère Bonnaud et Nicolas Bousquet. |
Création : 2005-01-22 Mises à jour : 2005-02-17 | 2005-03-06 | 2019-11-14 | 2021-02-16 |
Un grand merci à Pierre pour sa photo de la table, sous l'arbre à boudilles... |
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