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BOU-SAADA

L'oasis du Bonheur


Le moulin Ferrero

Le Moulin Ferrero.

Peinture de Charles Brouty

La renommée de Bou-Saâda n'est plus à faire. Cette petite ville construite sur les Hauts Plateaux n'est pas encore vraiment dans le Sahara. Mais elle en donne déjà un avant-goût qui vous incite à aller plus avant vers le Grand Sud. Connue depuis de longues années, elle a été le refuge de nombreux peintres connus, amoureux de scènes colorées et vivantes, dans un cadre exceptionnel de verdure, né de l'oued Bou-Saâda qui a la particularité d'être permanent ou tout de moins de l'avoir été.

Etienne Dinet, pour ne citer qu'un des plus connu des Orientalistes, tellement épris de cet endroit, repose ici dans un marabout choisi par lui, après sa conversion à l'Islam.

tombe de Dinet

La tombe de Dinet, en bordure de l'oued


Mon premier contact avec le Sud fut dans ma toute petite enfance la ville de Bou-Saâda, une oasis au milieu des Hauts-Plateaux, avant l'Atlas Saharien et le Sahara lui-même.

La plaine de la Mitidja est plus large que longue. Il faut peu de temps pour aller d'Alger à l'Arba. Une fois arrivés à l'Arba, l'Atlas est devant vous et il faut le traverser pour arriver sur les Hauts Plateaux et découvrir le Sud. La route qui franchit l'Atlas est belle et montre des paysages variés; La mer au loin jusqu'au col de Sakamody puis pendant la descente vers Aïn Bessem et Sour-el-Gozhlane (Aumale) sur des pentes abruptes domestiquées en y formant des "banquettes" pour y planter de la forêt et dans le lointain, l'Atlas Saharien dernier bastion avant le désert. PépinièreLa restauration des sols fut mise en œuvre depuis fort longtemps et continuée avec soin de nos jours. Sour-el-Ghozlane est une petite ville au pied du Dihra. Les environs sont doux au yeux, courbes délicates de collines cultivées, coupées de rangées de cyprès et d'autres espèces forestières. Il y avait à Aumale une pépinière dont mon arrière-grand père, Victor Tisserand, Inspecteur des Eaux et Forêts, a été l'un des fondateurs. Je garde d'Aumale un souvenir précis, d'autant que mon Père y a été mobilisé au moment de la Guerre 39/45 et que j'y ai passé une année scolaire dont je n'ai pas oublié les amis et amies et surtout Yacoub Saïbi, la première de la classe !!!Nous allions souvent nous promener dans la campagne, remplie d'asphodèles et d'amandiers. Malgré que tout ceci soit lointain, je n'ai jamais oublié.

De Sour-el-Ghozlane la route fuit vers le sud à travers le Dihra pour arriver à Bou-Saâda.

Le paysage changeait petit à petit. La végétation devenait rare et les montagnes et collines disparaissaient. Le reg Nous passions cependant devant une ferme où Papa me racontait toujours que le propriétaire, ayant fait un forage pour alimenter ses cultures, trouva du pétrole !!! Il le stockait dans un bassin et les camions qui allaient dans le grand sud, avec un appareillage spécial, s'approvisionnaient chez lui pour faire leur plein !!!. Enfin nous arrivions alors sur le reg. La route, long serpent gris, se déroulait au milieu d'une étendue infinie de platitude. Seulement des cailloux, des touffes de diss et rien à l'horizon tout autour de nous sur 360º. Une impression d'infini que je ne savais pas définir à l'époque, mais que j'ai ressenti de nombreuses fois par la suite à chacun de mes voyages, m'envahissait. C'était étrange et tellement inhabituel. Chose curieuse, dès lors que l'on s'arrêtait et attendait quelques instants, on voyait apparaître, surgis brusquement, un berger et son troupeau de chèvres ou de dromadaires... D'où étaient-ils sortis ? D'où venaient-ils ? On ne le savait jamais mais ils étaient là. Maman me recommandait immédiatement de ne pas toucher les pierres. Sous presque chaque caillou, il y avait un scorpion, et Papa me montrait l'évidence. C'est vrai sous chaque caillou il y a un scorpion !!! Gare à sa piqûre. Il fait mal et tue même les plus fragiles.

Au moment de l'arrivée, le soleil couchant illuminait le paysage de feux dorés et ses rayons caressaient les sommets des tables calcaires , collines érodées par le vent et le sable, disparaissait bientôt derrière elles : il ne restait plus qu'à organiser les merveilleuses promenades du lendemain, dans l'oasis et au-delà. Il y avait maints sujets de visites et de découvertes, ne serait-ce que le marché, si typique de ces villes des Hauts Plateaux, le marché aux moutons. Il existait même un ancien moulin, Le Moulin Ferrero, preuve que l'eau ici était présente constamment, au milieu des rochers, des palmiers et de toutes sortes d'autres arbres fruitiers. On peut imaginer le rêve en voyant cet endroit resté magique !!! On allait aussi visiter la Zaouïa d'El-Hamel, un important centre d'études islamiques qui eut la particularité d'être dirigé autrefois par une femme, Lalla Zineb.

OuedLes promenades au fond de l'oued m'enchantaient d'autant que je les faisais sur le dos d'un bourricot dont ma chère Grand-Mère ne pouvait s'empêcher d'ajouter à ce nom, les adjectifs "pauvre petit" : "pauvre petit bourricot" - je me demandais pourquoi - tout en continuant de rêver au jour ou je pourrais monter un de ces magnifiques chevaux arabes qui galopaient dans les dunes, pour le plus grand plaisir de nos regards. Puis nous allions dans les boutiques des orfèvres voir les couteaux ciselés, les Bou-Saâdi, dans leurs gaines de filali et les lourds bracelets et colliers d'argent incrustés de corail et d'émaux, les tailleurs qui pouvaient vous confectionner dans la journée la plus jolie robe copiée sur celles des Ouled-Naïls, danseuses tant connues de tous les peintres et des hommes avides de sensations érotiques. Autant vous dire que je restais sagement dans ma chambre quand toute la compagnie s'en allait le soir pour les voir!!! Elles avaient une réputation un peu sulfureuse et restaient un spectacle réservé aux plus grands. Il faisait beau et doux, surtout au printemps avant que n'arrivent les grandes chaleurs. Les soirées sur la terrasse de l'hôtel avec comme canopée la voûte céleste constellée d'étoiles, dans ce silence presque impressionant se prolongeaient fort tard, tant la douceur de ces moments était délicate. On voyait, au fur et à mesure que le bleu foncé devenait noir, les feux de diss allumés par les bergers dans les collines pour passer la nuit en sécurité avec leurs troupeaux.

Tableaux que la mémoire ne peut trahir.


ouledNail

Ouled-Naïl

Peinture d'Etienne DINET - 1903



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